lundi 20 octobre 2008

Recevoir et mettre en oeuvre une vision : Un entretien avec John Maxwell et Ron McManus

Le journal Ressources Spirituelles a demandé à John Maxwell, fondateur de INJOY Inc et de EQUIP, et à Ron MacManus, président de EQUIP, dont le ministère consiste en particulier à former des pasteurs et d’autres leaders, de partager leurs pensées sur le rôle de la vision dans l'église locale. Ils nous laissent des conseils pratiques qui aideront les pasteurs à recevoir et à mettre en œuvre une vision inspirée pour leur église.

POURRIEZ-VOUS DÉFINIR LA VISION ET SON IMPORTANCE DANS LE MINISTÈRE ?

Maxwell : La vision est une image de l’avenir que l’on désire ; une image de quelque chose que je n’ai pas atteint, mais que je veux voir et vivre, et que je désire partager avec ceux que je dirige. Quand le pasteur et son église ont une vision, ils sont prêts à investir leur énergie, leur temps, leur argent et leurs talents à la réaliser.

MOINS DE 5% DES PASTEURS ONT CONCRÉTEMENT DÉFINI UNE VISION. QUEL IMPACT CELA A-T-IL SUR L’ÉGLISE LOCALE ?

McManus : Le verset de l’Écriture qui dit : « Faute de vision, le peuple périt » a deux facettes. Faute de vision, les habitants de nos villes périront sans Christ, mais sans vision, l’église elle même finira par périr.

Les églises dont les membres se querellent ont perdu leur vision de ceux qui meurent sans Christ. Sans vision, les gens et l’église deviennent centrés sur eux-mêmes. Les gens commencent à remarquer les défauts des autres, et l’église s’autodétruit. Les pasteurs et les églises ne peuvent tout simplement pas se passer de la vision.

Maxwell : Chaque fois qu’une église se chipote sur des questions de détail, dites- vous qu’elle a perdu de vue ce qu’elle est appelée à être.

Lors de mes conférences sur le leadership, les pasteurs me demandent : « Avez-vous une vision pour mon église ? » Ils voudraient souvent que je leur dise la direction qu’ils devraient prendre et à quoi devrait ressembler leur église. Cette question a toujours tendance à me gêner.

Sans une vision, ceux qui dirigent dépérissent. Vous ne perdez pas seulement les gens, mais aussi ceux qui sont appelés à diriger; vous perdez tout ! Nous pensons souvent que les gens quittent les églises pour des questions de doctrine, mais la plupart du temps, c’est une question de motivation. La plupart des pasteurs ont du mal à saisir et formuler leur vision. Mais le fait d’être visionnaire est une qualité indispensable du leader. Rien ne rallie les gens autant qu’un leader qui communique l’espérance. Quand l’espéranceest là, le potentiel est énorme.

Tous ceux qui ont une vision ne sont pas forcément des leaders, mais tout leader a une vision. Quand quelqu’un vous dit qu’il ou elle dirige quelque chose, une question légitime serait : « Et quelle est votre vision ? »

Si un leader n’est pas en mesure de vous donner un tableau de ce qu’il ou elle voit dans l’avenir, cette personne n’est pas réellement le leader de cette organisation.

QUEL DANGER Y A-T-IL À AVOIR UNE VISION QUI N’EST PAS NÉE DE LA PRIÈRE ET N’EST PAS LE FRUIT D’UNE DIRECTION DE DIEU ?

Maxwell : Bill Hybels nous donne cette illustration : en moyenne, un pasteur aux États-unis reste environ trois ans et demi dans la même église. Le pasteur Jacques arrive dans telle église, convaincu que la bonne vision consiste à aller vers la droite. Tout le monde dans l’église se met à marcher vers la droite. Au bout de trois ans et demi, le pasteur Jacques s’en va et laisse la place au pasteur Jean-Pierre. Lui veut que tout le monde aille vers la gauche. La plupart vont donc changer leurs habitudes et marcher vers la gauche. Puis le pasteur Jean-Pierre s’en va et arrive le pasteur Lucien qui interpelle les croyants : « Je n’ai jamais vu une église aussi confuse! Certains vont à droite pendant que les autres vont à gauche… Nous devrions tous aller tout droit ! » Après trois pasteurs en moins de dix ans et trois visions différentes, comment voulez-vous que les gens ne soient pas troublés et frustrés ?

McManus : C’est aussi un peu ce qui arrive quand un pasteur assiste à une conférence. Les chrétiens se disent : « Dimanche prochain, il va nous en mettre plein la vue. » Et c’est ce qui arrive. Ils écoutent donc docilement, tout en se disant : « Ça lui passera… ». Et c’est ce qui finit par arriver. Il en résulte que la crédibilité est perdue auprès des assemblées car elles s’habituent à cette même rengaine.

COMMENT LES PASTEURS PEUVENT-ILS DÉVELOPPER UNE VISION POUR LEUR ÉGLISE QUI VIENNE RÉELLEMENT DE DIEU ?

McManus : Pour que les pasteurs reçoivent une vision, ils doivent entendre la voix de Dieu. Ils doivent prier et chercher la face de Dieu. Tout commence là, dans leur coeur. Dieu dépose quelque chose dans leur coeur et leur esprit, qu’ils vont communiquer efficacement à ceux qui les entourent parmi les responsables afin qu’ils puissent s’identifier à la vision et se l’approprier.

Maxwell : Les pasteurs doivent être de ceux qui prennent du temps avec Dieu. Laissez Dieu vous parler et agir en vous, tandis que vous l’écoutez honnêtement et qu’il vous montre ce que vous faites bien, et ce qui a besoin de changer— vos lacunes, vos points forts et vos dons. Nous demandons souvent aux gens de nous suivre alors que nous n’avons pas d’abord permis à Dieu de faire en nous tout un travail intérieur. Les gens ne vous donneront pas de vision, mais Dieu peut le faire. Bien souvent, quand les gens ont une vision, ils pensent que cela doit toujours être en grand : gagner ma ville pour Christ… Mais le problème de bien des pasteurs et de ce type de vision est le suivant : ils n’ont pas développé de stratégie pour y parvenir et voir s’accomplir leur vision. Tel pasteur prêche et communique son rêve et sa vision à son assemblée qui s’enthousiasme pendant une semaine, un mois ou deux, mais il n’y a pas de stratégie, de planification, ni de méthode pour réaliser cette vision.

Une stratégie, c’est bien plus que le simple espoir de voir s’accomplir la vision. L’espoir doit accompagner la vision, mais il nous faut une stratégie et élaborer un processus qui contribuera à faire de notre vision une réalité.

COMMENT LES PASTEURSDOIVENT-ILS COMMUNIQUER LEUR VISION À LEUR ÉGLISE ?

Maxwell : Les grandes visions se communiquent individuellement. Quand je pensais que Dieu me parlait sur tel ou tel point, avant d’en parler à mon église, je prenais le temps de m’asseoir avec ceux qui prennent part aux décisions dans notre église et je partageais ce que je ressentais comme venant de Dieu. Je leur laissais du temps pour partager leurs idées et leurs questions. Bien souvent, ils me posaient des questions qui m’amenaient à répondre : « J’aurais besoin d’encore un peu de temps pour considérer ce point-là. Je ne suis pas sûr d’y voir clair quant à cet aspect. » D’autres fois, ces personnes ajoutaient des pierres à l’édifice et m’aidaient à clarifier ma vision afin qu’elle soit plus claire ou plus accessible à l’ensemble de l’église.

Une des lois du leadership veut que les gens adoptent le leader avant d’adopter sa vision. La communication de la vision commence toujours par le relationnel. Je reçois ma vision dans le cadre de ma relation avec Dieu; je communique ma vision dans le cadre de ma relation avec les autres. Si ces relations ne sont pas ce qu’elles pourraient ou devraient être, de part ou d’autre, lors de l’émission ou de la réception du message, la vision va avorter.

Quand les pasteurs me demandent si leur église adoptera leur vision, je leur pose deux questions : « Vous a-t-elle adopté, vous, en tant que conducteur spirituel ? Si non, n’essayez même pas de leur communiquer votre vision. »

Ensuite : « Avez-vous vous-même digéré et intégré cette vision correctement ? »

Quand je parlais de ma vision à l’ensemble de l’église, cette vision n’était plus au stade de départ comme au moment où je l’ai reçue de Dieu. Elle était plus claire et plus grande. Elle était meilleure parce que le corps de Christ avait complété ce que Dieu m’avait donné. Si bien que, lorsque je la partageais avec l’église, les décideurs l’avaient déjà adoptée. Ainsi, après que j’ai communiqué ce message à l’église, les membres pouvaient en parler librement avec les responsables qui exercent une certaine influence, ces derniers étant déjà mes alliés pour m’aider à communiquer la vision à l’assemblée.

POURQUOI EST-IL SI IMPORTANT QUE L’ASSEMBLÉE ADOPTE LA VISION ?

Maxwell : C’est un grand facteur de réussite qu’un pasteur et une église qui ont développé et adopté une déclaration de mission ! Chacun peut dès lors s’identifier, s’impliquer, et s’investir dans la communauté à travers son église de façon unique et particulière. Quand une église adopte une vision et s’identifie à elle, le pasteur suivant qui envisage d’y venir peut prendre connaissance de sa vision et déterminer si son ministère correspond ou non à cette vision. Si tel n’est pas le cas, il aurait tort de lier son sort à celui de cette église.

DÉCRIVEZ LE TYPE DE VISION DONT L’ÉGLISE A BESOIN POUR AVOIR UN IMPACT SUR LA SOCIÉTÉ DU XXIÈME SIÈCLE.

Maxwell : Pour que l’église puisse faire la différence, elle doit renoncer à vouloir détourner ses regards d’elle-même. Les assemblées devront cesser de se regarder le nombril et répondre aux vrais besoins. La seule façon dont une église peut être pertinente est de sortir de sa zone de confort et se connecter aux incroyants. Il y a une véritable faim pour les choses spirituelles dans la culture d’aujourd’hui; les gens sont en recherche spirituelle, en quête de quelque chose qui les dépasse. Ça, c’est la bonne nouvelle ; la mauvaise est que les gens ne trouvent pas la réponse à leur recherche dans les églises qui se contentent de chanter des cantiques, de prêcher des sermons, de suivre leur programme, et de collecter des offrandes pour leurs propres besoins.

Mais d’autres églises sont prêtes à renoncer à tout pour tout donner et moissonner une récolte abondante. Elles connaîtront un succès tel que l’église n’a jamais connu depuis le livre des Actes.

Bien sûr, d’autres se cramponneront à leurs positions. Ces églises diront : « Nous avons notre pasteur, nous lui payons son salaire, et nous voulons notre culte, nos cantiques, nos bancs et nos emplacements sur le parking. » Mais l’église qui ne se remettrait pas en question sera plus vite dépassée et délaissée qu’elle ne l’imagine.

L’église ne restera pas la même. Soit elle s’épanouira parce que quelqu’un aura compris en quel temps elle vit, soit elle s’étiolera et mourra bien vite.

McManus : Nous devons bâtir des ponts vers le monde. De nombreux croyants ont grandi dans la foi avec une mentalité qui les pousse à garder leurs distances d’avec ce monde. Mais il nous faut changer de mentalité et amener la lumière à un monde enténébré.

L’église qui aura un impact au XXIème siècle est celle dont les rêves sont plus grands que les souvenirs. Vous savez que vos rêves sont plus grands que vos souvenirs lorsque vous entendez les gens de votre église dire : « Nous sommes reconnaissants pour le passé et tout ce que Dieu a fait, mais il tient de grandes choses en réserve pour nous dans l’avenir ! »

QUE DIRIEZ-VOUS AUX PASTEURS QUI ONT UNE VISION MAIS QUI NE LA VOIENT PAS S’ACCOMPLIR ?

Maxwell : Bien des pasteurs ont une vision qu’ils n’ont pas encore vu s’accomplir. N’oublions pas que, lorsque Dieu nous donne une vision, nous n’avons jamais les ressources nécessaires pour l’accomplir. Nous n’avons pas les gens, l’argent, le savoir, ou l’occasion. En fait, pour commencer, on ne dispose que de la vision elle-même. Et c’est précisément là que Dieu attend de nous que nous marchions dans l’obéissance selon le rêve qu’il nous a confié.

Nous avons tous tendance à dire : « Dès que je trouve les gens pour m’aider, je vais… » ou encore « Dès que quelqu’un nous donnera les fonds nécessaires, nous allons… ». Autrement dit, nous attendons souvent d’avoir les ressources avant de passer à l’action.

Jésus nous montre comment il veut que nous agissions par la façon dont il nourrit cinq mille personnes. Quand les disciples vinrent vers Jésus pour lui demander de régler le problème, il leur dit : « Donnez-leur vous-mêmes à manger ! ». Dieu n’agit qu’après que nous ayons fait le premier pas. Dieu nous donne la vision, puis s’attend à ce que nous marchions dans l’obéissance. Ce faisant, il pourvoira aux ressources nécessaires. Peut-être l’accomplissement de la vision est-il en chemin, si bien que seulement une partie des ressources sont disponibles. Le reste viendra en temps utile.

Pensez-y. Pourquoi Dieu enverrait-il les gens dans notre église si nous n’avons pas une grande vision ? Pourquoi Dieu donnerait-il à une église quelqu’un de riche en finances et en talents si tout ce que vous allez lui confier est de repeindre les toilettes l’année prochaine ? Ceci n’est pas une bonne gestion. Dieu nous accorde donc les ressources en fonction de nos rêves et selon notre obéissance. Et Dieu ne nous accorde ces ressources que lorsqu’on a commencé à marcher dans l’obéissance.

Les pasteurs qui ont un rêve et marchent dans l’obéissance sans avoir encore reçu les ressources nécessaires n’ont pas à s’inquiéter. Dieu n’a encore jamais donné une vision à quelqu’un qu’il n’ait pas l’intention de réaliser par son intermédiaire. Il n’a jamais donné non plus une vision qui serait accomplie du jour au lendemain.

Alors, allez de l’avant, soyez obéissant, et voyez Dieu accomplirla vision dans votre vie !

John Maxwell, D. Min., est un ancien pasteur, fondateur des ministères INJOY Inc. et EQUIP, à Atlanta en Georgie (États-Unis).Ron McManus est un ancien pasteur et membre du bureau exécutif des Assemblées de Dieu des États-Unis. Il est actuellement président du ministère EQUIP à Atlanta, en Georgie (États-Unis).

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